Homélie du 30 octobre 2022 : 31ème Dimanche TO/C
« Aujourd’hui, le salut est arrivé pour cette maison »
Frères et sœurs dans le Christ,
Dans l’épisode d’aujourd’hui, Jésus traverse Jéricho, avant de prendre le chemin qui monte vers Jérusalem. En entrant dans la ville, il guérit un aveugle (Luc 18, 35-43) et, à la suite de ce miracle, tout le monde cherche à voir le « prophète », y compris Zachée, le riche publicain. D’abord, il est peut-être complexé parce que petit de taille, et ensuite, sa curiosité par rapport à Jésus peut trahir un malaise : ce que Zachée entend dire de lui le surprend et le dérange. Ce Jésus qui exalte le bonheur des pauvres, et qui déclare malheureux les riches, qui est-il ? Peut-être a-t-il raison ? Peut-être alors, lui, Zachée le riche, est-il à plaindre ?
Curieux, il veut voir Jésus, mais il grimpe à un arbre feuillu, pour échapper au regard de la foule. Car à cause de son travail de collecteur d’impôts à la solde des Romains, Zachée est considéré comme « un pécheur par métier ». Il est « excommunié » et rejeté par ses compatriotes. Tout le monde le déteste. Il exploite et opprime les pauvres gens. Jésus surprend tout le monde en s’invitant chez lui. Au cours de cette visite, Zachée révèle un bon côté que personne ne soupçonnait chez lui : il est généreux et a le sens de la justice. En voyant ce bon côté, Jésus s’exclame : « Lui aussi est un fils d’Abraham ». En s’invitant chez Zachée, Jésus ne parle pas de conversion, de changement de métier, de partage de fortune. Le Seigneur dit simplement qu’il désire visiter cet homme rejeté par les autres. Zachée retrouve alors sa dignité d’être humain et descend de l’arbre pour « recevoir Jésus avec joie ». Nous avons tendance à penser que pour nous rapprocher de Dieu, il faut d’abord nous convertir, changer notre façon de vivre, revenir sur le bon chemin.
L’évangile affirme que c’est l’ordre inverse que Dieu a choisi : Jésus s’invite chez Zachée, lui démontrant tout le respect qu’il a pour lui, et alors ce pécheur de profession se repend : « Voilà, Seigneur : je fais don aux pauvres de la moitié de mes biens, et si j’ai fait du tort à quelqu’un, je vais lui rendre quatre fois plus.» Son action est à l’image de celle de Dieu qui surpasse toujours ce qu’on attend de Lui, comme le décrit si bien l’auteur du Livre de la Sagesse dont nous avons lu un extrait dans la première lecture. Écoutez ces paroles de nouveau car elles s’appliquent admirablement à notre propos : « Seigneur, tu as pitié de tous les hommes, parce que tu peux tout. Tu fermes les yeux sur leurs péchés, pour qu’ils se convertissent ». Jésus confirme sur le champ que le salut est arrivé dans cette maison dans un « aujourd’hui » qui est au-delà du temps.
Ce bel épisode de la visite de Jésus chez Zachée offre plusieurs éléments à notre réflexion chrétienne : en premier lieu, Jésus nous rappelle que lorsque nous jugeons les autres, nous avons tendance à ne voir que l’aspect négatif de leur conduite et nous devenons incapables de voir ce qu’il y a de bon chez eux. Jésus fait ressortir ce qu’il y a de meilleur chez Zachée, comme il l’a fait chez le bon larron, Pierre et les autres apôtres. Le Seigneur voit plus loin que nos faiblesses, nos lacunes et nos péchés. Il voit ce que nous pouvons devenir. Ce n’est pas le passé qui l’intéresse mais l’avenir.
Jésus nous invite ensuite nous aussi à descendre de notre arbre, car il veut venir chez-nous. Comme Zachée, nous avons tendance à juger le monde de haut, de notre lieu d’observation. Le Seigneur nous invite aujourd’hui à quitter notre lieu d’observation pour entrer chez nous avec lui. Là nous serons en mesure de mieux évaluer notre propre comportement. Nous verrons ce qui ne fonctionne pas bien dans notre vie, et nous serons moins tentés de juger et de condamner les autres.
C’est une invitation toujours actuelle qui est adressée à chacune et chacun de nous : « Aujourd’hui, nous dit Jésus, je veux demeurer chez toi ». Et lorsque nous l’aurons accueilli chez nous, Il dira à nous aussi « Aujourd’hui, le salut est arrivé dans cette maison ». Demandons que notre réponse aux invitations de Jésus que l’Esprit fait surgir en nous soit aussi prompte et aussi totale que celle de Zachée.
Père Pascal MUHINDO, Vicaire dominical